Le Droit à l'éducation
- Me. Sara-Hélène Georges
- Sep 21, 2021
- 3 min read
Ce texte est un extrait du mémoire de sortie de l'auteur, "Droit et inégalités scolaires en Haïti", soutenu pour l'obtention du grade de licenciée en Droit.
Il est publié sur ce blog à l'occasion de la rentrée scolaire 2021-2022.
L’importance de la formation des personnes s’est concrétisée en faisant du droit à l’éducation l’un des droits fondamentaux et l’un des droits-créances dont l’État est redevable aux citoyens. En effet, « l’éducation est officiellement reconnue comme un droit de l’homme depuis l’adoption, en 1948, de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme »[1]. Selon l’article 26 de cette Déclaration : « toute personne a droit à l’éducation ».
En Haïti, le droit à l’éducation a une valeur constitutionnelle dans la mesure où, non seulement il a été fait mention de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 dans le Préambule de la Constitution de 1987, mais aussi dans le Chapitre traitant des droits fondamentaux, il est réservé toute une section à l’éducation et l’enseignement. L’article 32 de cette Constitution dispose que « l’État garantit le droit à l’éducation », ce qui renforce le caractère de droit-créance que revêt l’éducation.
Ce même article 32 de la Constitution haïtienne de 1987 poursuit en rajoutant que « il [l’État] veille à la formation physique, intellectuelle, morale, professionnelle, sociale et civique de la population ». Cette phrase peut être considérée comme étant la vision générale que le Constituant avait de l’éducation, en ce sens que cette disposition constitutionnelle prône un système d’enseignement qui interviendrait pour beaucoup dans « l’instruction sur les vertus morales et politiques »[2]. Cette vision fait donc référence à la notion d’éducation nationale qui se distingue de celle d’instruction publique.
Nous pouvons différencier l’éducation nationale de l’instruction publique en nous référant à une citation de Rabaut Saint-Etienne. Effectivement, ce dernier eut à dire ce qui suit : « il faut distinguer l'instruction publique de l'éducation nationale. L'instruction publique éclaire et exerce l'esprit ; l'éducation nationale doit former le cœur ; la première doit donner des lumières et la seconde des vertus ; l'instruction publique est le partage de quelques-uns ; l'éducation nationale est l'aliment nécessaire à tous ».
L’éducation est alors un moteur de développement et très certainement le chemin obligé qu’Haïti doit emprunter pour sortir de l’ornière où elle se trouve. Selon Délima Pierre : « l’éducation continue à être la première orientation politique qui puisse contribuer à sortir la société haïtienne de ses torpeurs, de ses misères, de ses drames sociaux, politiques, économiques, environnementaux et humains pour qu’elle ne soit pas perçue en bout de ligne comme une menace pour l’humanité »[3].
Le choix de prôner la notion d’éducation nationale en ce qui a trait à l’enseignement et la formation de la population est judicieux dans la mesure où, face à une société divisée où la norme est la guerre de tous contre tous et la guerre de chacun contre tous, l’importance de l’éducation est d’autant plus flagrante en ce sens qu’« il est impossible de fonder ou instituer une République sans la prise en compte des valeurs de l’éducation appelée à donner aux jeunes générations le sens du vivre ensemble, des valeurs communes, de l’unité, de la solidarité, de l’intérêt général qui soudent les individus les uns aux autres et en font un être collectif appelé Communauté, Société, Peuple, Nation »[4].
Cependant, malgré le fait qu’une éducation nationale est prévue dans les textes, tel n’est pas le cas dans les faits. Cette notion d’éducation nationale renvoie à l’idée selon laquelle « pour fortifier le sentiment national, il faut uniformiser l’enseignement »[5]. Or, l’enseignement en Haïti est tout sauf uniforme.
En effet, le cadre normatif du système éducatif haïtien est plutôt synonyme d’inégalités en ce sens que tant au niveau quantitatif que qualitatif, il ne s’apparente nullement aux principes véhiculés par la notion d’éducation nationale.
[1] UNICEF, Une Approche de l’Education pour Tous Fondée sur les Droits de l’Homme, 2008. [2] Pierre-Eugène Muller, De l’instruction publique à l’éducation nationale, 1999 in www.persee.fr. [3] Délima Pierre, Constitutions, Lois et éducation en Haïti (1801-2011), Québec, éditions Mémoire, 2e édition, 2014, page 169. [4] Ibid., page 170. [5] Pierre-Eugène Muller, De l’instruction publique à l’éducation nationale, 1999 in www.persee.fr.
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